LES LÉGIONS DE VARUS LAS LEGIONES DE VARO
De la revista “La Gazette rimée” (1867)
Auguste regardait pensif couler le Tibre; Augusto,
pensativo, miraba pasar el Tíber
Il songeait aux Germain : ce peuple pur et libre y pensaba
en los germanos. Ese pueblo libre y puro
L’étonnait; ces gens-là lui causaient quelque effroi: le
sorprendía, esas gentes le producían escalofríos:
Ils avaient de grands cœurs et n’avaient pas de roi. tenían
grandes corazones pero no tenían rey.
César trouvait mauvais qu’ils pussent se permettre César
consideraba pernicioso que pudieran permitirse
D’être fiers, et de vivre insolemment sans maître. ser
orgullosos y vivir insolentemente sin amo.
Puis le bon César prit pitié de leur erreur A continuación,
el bondadoso César se compadeció de su error
Au point de leur vouloir donner un empereur. hasta el punto
de querer otorgarles un emperador.
Il crut d’un bon effet qu’aussi l’aigle romaine Creyó
también beneficioso que las águilas romanas
Se promenât un peu par la forêt germaine: se dieran un paseo
por los bosques germanos:
Il n’est tel que son vol pour éblouir les sots; no hay nada
comparable a su vuelo para deslumbrar a los tontos.
Puis, l’or des chefs germains lui viendrait par boisseaux; Después, el oro de los jefes germanos le llegaría a espuertas.
On s’ennuyait; la guerre était utile en somme: Se aburría. La guerra le resultaba sumamente útil:
On n’avait pas d’un an illuminé dans Rome. no pasaba un solo
año sin promoverse desde Roma.
Auguste se souvint d’un homme de talent; Augusto se acordó
de un hombre de talento.
Varus s’était montré proconsul excellent: Varo se había
rebelado como un excelente procónsul:
Maigre il était entré dans une place grasse, estando flaco
había ocupado un puesto jugoso;
Et s’en était allé gras d’une maigre place. y tras ponerse
gordo, un magro puesto.
Donc Varus, que César aimait pour ses travaux, Así que Varo,
al que César quería por sus esfuerzos,
Ayant trois légions, trois ailes de chevaux, contando con
tres legions, tres alas de caballería,
Et, pour arrière-garde, ayant quatre cohortes, y cuatro
cohortes en vanguardia,
De l’Empire romain les troupes les plus fortes, de entre las
más potentes del Imperio romano,
Mena ces braves gens à travers les forêts, condujo a esos
bravos a través de los bosques,
Le front dans les taillis, les pieds dans les marais. la
frente entre los ramajes, los pies en los pantanos.
Alors la forêt mère, inviolée et sainte, Luego la selva
madre, sagrada e inviolada,
Étreignit les Romains dans son horrible enceinte, constriñó
a los romanos en su abrazo horrible,
Les fit choir dans des trous, leur déroba les cieux; les
hizo caer en sus fosas, les arrebató los cielos;
Chaque arbre avait des doigts et leur crevait les yeux. cada
árbol tenía dedos y les golpeaba en los ojos.
Les soldats abattaient ces arbres pleins de haines; Los
legionarios talaban los troncos llenos de odio;
Et les chevaux, oyant gémir l’âme des chênes, y los
caballos, oyendo gemir el alma de los robles,
Se jetaient effarés dans la nuit des halliers, atemorizados
se lanzaban contra la noche de los matorrales,
Et, contre les troncs durs, brisaient leurs cavaliers. y
contra las duras cortezas estrellaban a sus jinetes.
Des flèches cependant venaient, inattendues, Entretanto, las
flechas llegaban inesperadamente
Aux arbres ébranlés, clouer les chairs tordues; de los
árboles sacudidos, clavándose en la carne que se retorcía.
Et les
soldats mouraient la javeline aux mains. Y los soldados caían con la
jabalina entre las manos.
Hermann était debout au milieu des Germains; Arminio estaba
al frente de los germanos.
Le chef dormant s’était relevé pour leur cause, El jefe
dormido había defendido su causa.
Hermann,
gloire sans nom! Hermann! l’homme, la chose ¡Arminio, Gloria
ineffable! ¡Arminio, el hombre y el objeto
De l’antique patrie et de la liberté, de la antigua patria y
de la libertad,
Toujours beau, toujours jeune et toujours indompté! siempre
espléndido, siempre joven e indomable!
Le chef blond était là, dans sa force éternelle; El rubio
líder se hallaba allí, con su eterna fortaleza.
Pieuse, le gardait la forêt maternelle. Piadosa, le cobijaba
la selva maternal.
Le chef au pavois rouge, autour du bois hurlant, El jefe de
rojo escudo, gritando alrededor del bosque,
Serrait un long cordon de Germains au corps blanc; reunió un
gran contingente de blancos germanos;
Et, trois jours et trois nuits, la sainte Valkyrie, y
durante tres días y noches la santa Valkiria
Sur ces bois pleins de sang, fit planer sa furie: hizo
planear su furia sobre esos bosques llenos de sangre:
Son œil bleu souriait, — et ses neigeuses mains su Mirada
aceraba sonreía, y sus nivosas manos
Tranchèrent le jarret aux enfants des Romains. sajaron la
pantorrilla de los hijos de los romanos.
Lorsque le courrier vint, poudreux, dire l’armée Cuando
llegó el mensajero polvoriento, diciendo
De l’empire romain dormant sous la ramée, que el ejército
imperial yacía bajo el follaje,
L’empereur en conçut de si fortes douleurs el emperador
sintió tan fuertes dolores
Qu’il ôta de son front sa couronne de fleurs, que se arrancó
de la frente su corona floral
Et renvoya la foule au milieu d’une fête; y despidió a la
multitud en mitad de la fiesta.
Aux tapis de son lit il se cogna la tête, Contra el edredón
de su lecho se golpeaba la cabeza,
En s’écriant : «Varus, rends-moi mes légions!» exclamando:
“¡Varo, devuélveme mis legiones!”
Bien quitte alors envers les expiations, Habiendo cumplido
de sobra con sus expiaciones,
Il allait s’endormir, quand, pleurante et meurtrie, se fue a
dormir cuando, sollozante y magullada,
Devant ses yeux mal clos, se dressa la Patrie. ante sus ojos
apenas cerrados se presentó la Patria.
«César, rends-moi mes fils, lui dit-elle; assassin, “César,
asesino, devuélveme a mis hijos”, le dijo,
Rends-moi,
rends-moi ma chair et le lait de mon sein! “¡devuelve, devuélveme mi
carne y la leche de mi seno!
César, trois fois sacré, toi qui m’as violée, César, tú que
me has violentado, a la tres veces sagrada,
Et qui m’as enchaînée et qui m’a mutilée, y que me has
encadenado y mutilado,
Oui, la chair et le sang de mes plus beaux guerriers, ¡sí,
la carne y la sangre de mis espléndidos guerreros
N’est vraiment qu’un fumier à verdir tes lauriers! no es en
verdad más que abono para enlustrar tus laureles!
À leur cime, une sève épouvantable monte, A su copa una
savia espantosa asciende,
Hélas ! et
fait fleurir ma misère et ma honte. ¡ay!, y hace florecer mi miseria y
mi vergüenza.
Et je n’ai plus mes fils, ceux qui dans mes beaux jours Ya
no tender a mis hijos, aquéllos que en mis mejores días
Me couronnaient d’épis, me couronnaient de tours. me
coronaron con espinas, me coronaron con torres.
Rends-moi mes légions, ma force et ma couronne, ¡Devuélveme
mis legions, mi fuerza y mi corona,
Et dors sous tes lauriers, car leur ombre empoisonne! y
duérmete bajo tus laureles, pues su sombra envenena!
Autrefois, quand, aux jours de ma fécondité, Antaño, cuando
en los días de mi fecundidad
J’enfantais dans la gloire et dans la liberté, daba a luz en
medio de la gloria y la libertad,
Je riais à mes fils morts pour la cause sainte, sonreía a
mis hijos muertos por una santa causa,
Tombés en appelant ceux dont j’étais enceinte: caídos en
nombre de los que estaba yo encinta:
Leurs frères étaient prêts, et mon œil radieux sus hermanos
estaban listos, y mi mirada radiante
Les suivait citoyens, les perdait demi-dieux. les acompañaba
como ciudadanos, les perdía como semidioses.
Je sentais des guerriers frémir dans mes entrailles, Sentía
a los guerreros revolverse en mis entrañas,
Et mon lait refaisait du sang pour les batailles… y mi leche
se convertía en sangre para las batallas…
Mais, comme la lionne, en sa captivité, Pero, como la leona
en su cautividad,
Je fais tout mon orgueil de ma stérilité. saco todo mi
orgullo de mi esterilidad.
César ! vois mes beautés maternelles flétries; ¡César! Mira
mi belleza materna marchita,
Vois pendre tristement mes mamelles taries. mira cómo
cuelgan tristemente mis mamas agotadas.
Sur les fruits de ton viol mes flancs se sont fermés; Mis
caderas se cierran a los frutos de tu violación,
Je ne veux pas des fils que ton sang a formés. no quiero a
los hijos que tu sangre ha creado.
Rends-moi mes légions, ces dernières reliques ¡Devuélveme
mis legiones, esas últimas reliquias
De la force romaine et des vertus publiques! de la fuerza
romana y las virtudes públicas!
César! rends-moi leur sang précieux et sacré; ¡César,
devuélveme su sangre preciosa y sagrada,
Rends-moi
mes légions!... mais non, non; je croirai devuélveme mis legiones...!
Pero no, creería
Le ciel assez clément et toi-même assez juste, al cielo
demasiado clemente y a ti demasiado justo,
Si seulement tu veux, divin César Auguste, con que sólo
accedieras, divino César Augusto,
De tout ce sang glacé que les lunes du nord de toda esa
helada sangre que las lunas del norte
Boivent, de tant de chairs que la dent des loups mord, se
beben, de toda la carroña que devoran los lobos,
Me rendre ce qu’il faut de nerfs, de chair et d’âme, entregarme
los restos de nervios, tendones y alma
Pour tirer de ton cou tordu ton souffle infâme!» para
arrebatarle a tu cuello retorcido su infame aliento!”
Ainsi, sur l’empereur roulant ses yeux ardents, Y así
clavando en el emperador sus ojos como ascuas
Hurla la Louve, avec des grincements de dents. aulló la Loba
con rechinar de dientes.
Puis Auguste entendit des murmures funèbres Después, Augusto
escuchó los murmullos fúnebres
Tout remplis de son nom monter dans les ténèbres que
repetían su nombre, ascendiendo de las tinieblas
Formidables, et vit, par le ciel entr’ouvert, formidables; y
vio en el cielo entreabierto
Des soldats défiler, blancs sous leur bronze vert; desfilar
a sus soldados, blancos bajo sus bronces orillados;
Et Varus, qui menait la troupe pâle et lente, y a Varo, que
mandaba aquella tropa pálida y torpe,
Leur montrait le César de sa droite sanglante. mostrándole su
ensangrentada diestra al César.
César ferma les yeux et sentit, tout tremblant, César cerró
los ojos y sintió, lleno de temblores,
Ses lauriers d’or glacer son front humide et blanc. que sus
laurels dorados helaban su frente húmeda y blanquecina.
Tendant ses maigres bras au ciel de Germanie, Extendiendo
sus flacos brazos hacia los cielos de Germania,
Il cria, blême, avec un râle d’agonie: gritó, palideciendo,
con un gemido de agonía:
«Varus! garde la troupe intrépide qui dort! “¡Varo! ¡Llévate
otra vez la tropa intrépida que duerme!
Garde mes légions, ô ma complice! ô Mort!» ¡Llévate mis
legiones, cómplice mío! ¡Oh, Muerte!”
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